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Diam’s sans jeu de mots, 5

Diam’s sans jeu de mots, 5

Diam's sans jeu de mots, 5
Mis en ligne le lundi 3 mai 2010 ; mis à jour le mardi 6 avril 2010.

Publié dans le numéro 05 (10-23 avril 2010)

20 mars, Orléans, l’Astrolabe. Les basses me font vibrer, la salle est petite, on est tous debout à dix mètres au plus de Diam’s, il y a quelque chose d’un peu magique à être là, en arrivant j’ai dit que j’étais sur la liste, on m’a donné un autocollant « Auguri productions, AFTER SHOW ». After show veut-il dire que toutes les portes s’ouvriront ensuite ? On verra.

Diam’s est en pleine forme, ça bouge, c’est physique, c’est le moment de dire que je ne suis quasiment jamais allé dans ce genre de concerts et que je suis impressionné - mais aussi un peu déçu : sur scène, c’est nettement moins soigné que sur disque, Diam’s chante moins bien, le son n’est pas bon, et puis il y a cette ambiance typique d’un phénomène de groupe, pénible : le public comme un tout indistinct, il faut se balancer de gauche à droite, reculer, avancer, en rythme, tous ensemble. Lever le poing en l’air (à la rigueur, ça fait Black Panthers, j’aime bien).

Stéphanie Binet m’avait dit de bien écouter ce qui se disait entre les morceaux. Là aussi un peu de déception, j’imaginais plus de perspective, de débat, en fait l’ambiance est à la kermesse (cela dit le public n’a pas l’air de forcément attendre une dissertation sur le rapport des artistes aux médias). Certains moments m’intéressent : « il n’y a que sur scène que je peux le dire : S.O.S. est double disque de platine » (soit 200.000 exemplaires vendus). Et puis après « Lili », la chanson sur le voile : « chaque fois qu’on chante Lili c’est un peu particulier pour moi, d’autant que ça me ramène à l’époque où j’écrivais le disque et où on me disait «ne parle pas de ça, tu vas te griller, surtout pas en France», et quand je vois les réactions des gens dans les salles de concert, je me demande qui était les plus intolérants. Merci pour votre ouverture d’esprit ! » Voilà pour qui s’inquiéterait d’un quelconque « prosélytisme » de la chanteuse ; dans la salle il y a très peu de femmes voilées, très peu même de non-blancs.

Le concert déroule quasiment toutes les chansons de S.O.S., plus quelques tubes des disques précédents. Le mélange est étrange entre les chansons du nouveau disque, sombres, intimes, dépressives, et les tubes légers des années précédentes. Au début du concert, Diam’s annonçait : « si je fais bien mon travail, toi, tu te retrouveras là, toi, tu te seras là, et toi, tu seras fatigué ». Raté : à la fin, on est tous plus au moins à la même place, l’ambiance n’est pas à la folie.

Dernière chanson : « S.O.S. », qui s’adresse à un homme marié, dont Diam’s dit espérer qu’il l’entendra à la radio, qu’il viendra l’écouter en concert, qu’il verra son public : « seras-tu là, devant la scène, quand ils chanteront pour toi ? ». La chanson est assez déchirante sur le disque, plus encore sur scène, elle a été conçue pour ça, pour faire pleurer l’homme en question, et c’est dur de ne pas se demander s’il est là, dans la salle, dur de ne pas se mettre à sa place.

Rappel. Diam’s revient avec « Si c’était le dernier », qui débute par son « tour chez les dingues, là où le bonheur se trouve dans les cachetons ou les seringues », et qui s’attaque à la célébrité : « tu veux devenir célèbre ? Sache que la vie de star est une pute » ; « ils ne connaissent pas la taille des problèmes que t’apporte la gloire, une épée de Damoclès au-dessus de la tête ». Dix minutes crachées comme une kalachnikov, avec parfois un peu de répit grâce à un petit boitier relié à un fil qui permet à Diam’s de basculer vers une version playback.

Fin du concert. Je m’approche de la porte qui mène au backstage. Je montre mon badge « after-show ». Le jeune videur (de la salle) me demande d’attendre, appelle un grand noir de la sécurité de Diam’s. Je lui demande à voir Sébastien Catillon (mot-clé magique). - Tu le connais personnellement ? - Oui, oui, c’est Raphaël, du Tigre. Il referme la porte, disparaît un long moment. Le jeune videur part voir quelqu’un à l’autre bout de la salle. La voie est libre. Je n’ai qu’à ouvrir la porte, entrer, me glisser dans ce backstage que j’imagine violemment : la tension qui retombe, des gens qui s’affairent en tout sens, Sébastien Catillon qui est là, à qui je vais parler, Diam’s au loin en train de boire une bouteille d’Evian. Mais je ne bouge pas, retenu une fois encore par ce scrupule de ne pas être un vrai journaliste, un vrai fouineur. Monsieur Sécurité revient : C’est mort, ils debriefent, c’est mort pour toi. J’attends encore un peu pour le principe. Dans un coin de la salle, il y a Jimmy, le D.J., qui discute avec ses parents. Là encore je devrais aller leur parler, je devrais aller à la pêche, mais à quoi ? Aux informations ? Aux secrets ? Au fait de voir Diam’s crevée après le concert ? Je réalise qu’il est impossible de trouver une juste place : soit je suis accepté en backstage, mais alors je suis de leur côté, ce que je raconterai je le ferai en les protégeant ; soit je fais comme l’autre jour chez Catillon, je viens sans autorisation, mais là on me ferme la porte au nez, et ce que je raconte c’est ce que je n’ai pas pu voir. Alors que faire ?

 

 

 

 

 

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