Dans l’arrière-boutique des ship managers
Dans l’arrière-boutique des anthropologues
« J’arrive à faire face à à peu près tout »
« Le respect de la diversité n’est pas une donnée française »
Une audience à la Cour nationale du droit d’asile
Grothendieck mon trésor (national)
Publié dans le
numéro VIII (mars-avril 2008)
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Le 22 mars
1518, il y a tout juste 490 ans, Fernão de Magalhães, l’éclatant
circumnavigateur lusitanien, que l’on se refusait encore de nommer
Magellan
parce qu’il ne s’était toujours pas résolu à découvrir son propre
détroit,
savourait avec une délectation sans freins l’instant présent où Carlos 1er
qui, lui, n’avait pas encore fait usage de son patronyme commercial
de
Charles Quint - paraphait le contrat qui allait le lier
à la Couronne espagnole. Il pouvait apprécier son coup, notre
Magellan ! Car recevoir l’aval du Roy pour mettre à la voile toute
une équipée lancée vers des contrées inconnues n’était pas un pari
gagné ! Avant cela, à Lisbonne, de Magalhães n’avait pourtant pas
économisé son zèle ni les témoignages de son volontarisme. Il alla même
combattre la piraterie marocaine au large des terribles côtes
d’Afrique !
Mais ce fut là un élan de trop : il y laissa un genou, qui en plus de
lui
rendre à jamais la démarche roide et claudicante, devint très vite le
premier
acte de sa disgrâce. Lorsque plus tard il fut chargé de garder des
moutons
confisqués aux Maures et que le bétail disparut, aussitôt la médisance
délatrice - qui aime à choisir les impotents, le phénomène est connu -
l’accusa
de prévarication ; de gestionnaire de moutons, il devint bouc
émissaire,
ce qui fut plus commode pour ensuite l’accuser de déserteur ! Il n’en
fallut pas plus pour que notre malheureux se résigne, comme le fit
avant lui ce
sacré Colombus, à frapper à la porte espagnole. Malgré une disgrâce
qu’il
fallut savamment dissimuler, de Magalhães, en se mariant avec la fille
d’un
Chevalier de Saint Jacques qui avait les faveurs de Carlos, sut
s’ouvrir les
portes de Valladolid qui elles-mêmes débouchèrent sur le contrat de sa
vie.
Heureuse malice : dix années de droit exclusif dans des mers
inconnues ;
cinq caravelles et leur équipage ; avec ce droit spécial qui, s’il
découvrait plus de six îles, ferait de lui l’hériter des deux plus
belles et le
possesseur d’un vingtième des richesses glanées dans les autres ! « A
moi les Moluques ! » s’écria pour lui-même notre heureux boiteux.
Fallait-il que trois ans plus tard, sur une plage inhospitalière, le
découvreur
tomba sous les flèches de farouches qui visèrent un genou valide. Et
Magellan
de se noyer par trente centimètres de fond, riche et grand
propriétaire.
Achille avait maudit son talon, l’Histoire peut aussi se faire sordide
avec des
genoux...