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Un discours à l’Élysée

Un discours à l’Élysée

Un discours à l'Élysée
Mis en ligne le mardi 4 novembre 2008 ; mis à jour le lundi 3 novembre 2008.

Publié dans le numéro X (juillet-août 2008)

Intervention à la télévision de Nicolas Sarkozy, président de la République, le 24 avril 2008, en direct du Palais de l’Élysée. Préparatifs de l’émission. Le Tigre avait une taupe parmi l’équipe technique. Taupe qui a noté les conversations entendues sur le plateau du tournage. Et comme on dit dans ces cas-là : les prénoms ont été changés.

 

 

— Les néons sont un peu forts, mais on peut pas les dimmer.
— Ne montre pas les lustres, ils ne veulent pas que ça fasse Versailles.
— Les drapeaux, on les recule dans le même axe ? On descend la marche ?
— Chuis désolé les cocos, vous allez vous faire chier. Mais bon : vous pourrez écouter votre président.
— La fresque est très orientale, ces chevaux cabrés...
— On peut l’éclaircir.
— C’est le thème qui est oriental, pas la couleur. Sinon on aurait mis de la bombe à matter. Mettez un rideau rouge.
— Et qu’est-ce que tu veux que je fasse si j’ai pas de VL 3000 ?
— Le président fait du sport et ne désire pas être photographié.

 

— Cette salle est une verrue sur un édifice charmant.
— Les journalistes ne vont pas dépasser, tu rêves : ils vont se fliquer mutuellement, si l’un d’eux est trop long, il va se faire assassiner par les autres ? Non, le seul pépin qu’il pourrait y avoir, c’est que Sarko se lance dans un tunnel.
— S’ils continuent comme ça, ils vont perdre Fogiel.
— T’as le retour TF1, France 2, M6. France 2, chuis pas en seize neuvièmes. On n’est pas sur LCI ?
— Non. Ce sont des chaînes secondaires.
— S’il reste de la place, mets Canal, comme ça j’aurai le Grand Journal. Pourquoi j’ai pas de couleur ? Déjà que j’ai pas le bleu dans le champ.
— J’ai un retour de ce qu’on envoie.
— Je te rappelle qu’évidemment, il faut jamais jamais jamais que le président soit coupé.
— Bertrand, t’as les faces ?
— Je viens de donner quatre mille euros au fisc, je trouve qu’ils auraient pu changer la moquette : depuis que je suis dans le métier, c’est la même.
— Mets ton casque. On change la tige des drapeaux.
— Pujadas, il est tout petit : il sera caché.
— Qu’est-ce qu’ils me font avec ce drapeau à la con ?
— Votre plaque, c’est un tastevin ?
— Attends, il est pas plus petit que le président.
— Non, pas du tout, on branle rien. On sera occupés à vingt heures quinze, pas avant.

 

 

 

— Risque zéro ; tu fais avec et sans accent. Quoi ? A-U-G-E-R : t’es sûr ? Qui dit ça ? La chaîne ? OK. Mais fais gaffe avec le générique de fin.
— Est-ce qu’on peut avoir la cinq au final ?
— Bon, la doublure, il fait quoi par rapport au président ?
— Ah non, les ch’tis, c’est pas moi.
— Sur la quatre, ça se voit vraiment.
— Qui disait que c’était grave, tout à l’heure ?
— Seb.
— Seb ? Mais je croyais que c’était quelqu’un d’officiel ! Remets celui que je veux, dans ce cas.

 

 

 

— J’ai envie d’un royal bacon avec des potatoes et un grand coca zéro : j’ai faim.
— Putain mais ils ont laissé un balai dans la cour ! Mais on va se faire brasser ! Regarde : un balai dans le gravier !
— Bon, on voit un bout de rouge, donc c’est jouable. Assieds-toi en doublure. Élargis un peu, pour choper le rouge. C’est nickel. ... Eh attends, c’est quoi ce panneau rouge sombre ? Putain mais il est pas éclairé ! Viremoi ça ! C’est juste immonde, ça fait des ombres.
— Ça cache les consoles.
— C’est minable. Mais je vire ça, putain je vais démonter toutes ces consoles ! C’est impossible ! Enlevez-moi ça ! ... Philippe, t’en dis quoi ? J’ai jamais vu un truc aussi moche ! C’est impossible ! ... On m’entend, sur le plateau ? Enlevez-moi ça ! J’ai jamais donné l’autorisation de les laisser là ! ... On voit un bout de pont. Fermez un peu les rideaux. Ah non, ce pont-là, je le vois moins. À gauche de la dorure.
— L’antenne est juste sur la tête de Poivre.

 

 

 

— On aurait pu mettre les chaînes d’appartenance pour valoriser France 5 et France 3. Pas les logos : écrit. Essaye. ... Ferme le rideau et on est dedans. Ce qu’on voit, c’est des techniciens. Ils sont tous en veste ? C’est l’axe principal. Gazelle, t’es à ta caméra ? Mets-moi du monde devant et hors-champ. ... Le vrai problème, c’est pourquoi il y a Philippe partout dans la presse. Il est cher, son attaché de presse ? Appelle-le, on va le chambrer. ... Mais vous êtes terribles ! Vous avez décidé de laisser les consoles contre mon avis, vous assumez : vous mettez pas ce tissu rouge ! On voit la technique, on vit avec, si on commence à cacher, on voit tout, ah, y a Brice Hortefeux. ... Un bacon cheese ? Allô ? Tu nous apportes des bacon cheese et du coca light. Non : zéro. Pour le car, pas pour le plateau.
— J’ai la pige de la mort dimanche, onze heures dix-huit heures avec une grande coupure de trois heures.
— C’est quoi ?
— Stade 2. Y a pas de roulage. J’aurais dû mettre un travelling.

 

 

 

— Si on fait une boulette il se passe quoi ? Prison ?
— Contrôle fiscal. Sur trois générations.
— Remets-toi côté journalistes. ... Vous pouvez filmer, trois, quatre, cinq ? Mais pourquoi ils se barrent ? Vous filmez le président. Attends, redresse-toi, s’il te plaît. Fais-le sérieux. Regarde de l’autre côté. Avec l’amorce, gazelle. Mais non, fumier, l’autre. C’est quoi ton plus large ?
— Il y a quatre canards sur la pelouse.
— En plongée, on va pas avoir des problèmes de calvitie sur Poivre ?
— Non, il a... Ça a repoussé.
— On peut voir les lustres, en fait. Mais pas Versailles.
— Attends, t’as vu le décor ? Et tu peux m’expliquer pourquoi on aurait choisi des fauteuils dont on pourrait pas filmer les pieds ?
— À dix-heuf heures on refait le tour des axes. Vous êtes tous libres.
— À table !
— À dix-huit heures il y aura un buffet.

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